Mais quelle journée de meeeeerdeu ! Alors ce matin, je me prépare. Nickel sur le timing. Je m’dis « bon, j’la joue cool aujourd’hui donc jeans et une chemise avec deux pans qui s’ouvrent dans le dos sur de la dentelle. Expliqué comme ça, il parait moche mon chemisier.

OK c’est moche mais c’est pas le sujet.

Bref, tête en bas, tu te sèches les cheveux. Tu relèves la tête d’un coup pour garder le volume au moins 5 minutes. De la buée sur le miroir donc tu vois pas grand chose mais bon, ça fait 30 ans que tu fais la même coiffure tous les matins, pas grand chose à observer de nouveau. Machinalement, tu regardes dans ton dos. Tu distingues comme une grosse moumoute mais à cause de cette putain de buée tu ne discernes pas trop si c’est une moumoute de poussière ou une moumoute d’un pull sachant que tu ne portes jamais de pull.

Tu sors ton bras super élastique, tu le plies pour qu’il puisse atteindre la moumoute. Tu risques la luxation du coude, de l’épaule et du cou.
D’un geste assuré, tu balaies du revers la touffe-moumoute vue dans le miroir embué.

Tiens, drôle de sensation.

Oh putain, tu jètes le sèche-cheveux (oui parce que pour rester dans le timing, tu balayais la moumoute d’une main mais l’autre, programmée depuis tant d’années, sait ce qu’elle a à faire avec tes cheveux et est plutôt autonome). Le sèche-cheveux vient s’écraser comme une merde contre la faïence du mur. Tu pousses tantôt des hurlements de trôle en rut ce qui donne à peu près « haaaaaaa » tantôt des « hiiiiiiii » de jeune vierge. Tu sors, bras en l’air de ta salle de bain privative et tu fais le tour de ta chambre, tu montes sur le lit, tu redescends, tu remontes, tu sautes sur le lit, toujours bras en l’air. Grande mycose pense que tu  t’es électrocutée mais surtout, n’accoures pas pour me sauver hein. « Je t’ai entendu hurler alors je me suis dit que tu t’étais pas électrocutée. ». Oui, c’est vrai, dans la vie, le seul danger mortel est l’électrocution, c’est bien connu. ».

Petite mycose rie. Elle croit quoi ? Que je suis en train de « chahuter » avec papa ?! Impossible, on est pas samedi.

Chéri courre et me crie « qu’est ce qu’il y a ? ». Limite, tu peux imaginer sa cape de super héros.

La moumoute, c’est une araignée énorme, velue avec 8 putains de pattes qui s’agrippent à la dentelle de ton chemisier moche.
Et là, tombe la question à la con, tellement débile que toi même tu doutes. Donc même en situation d’urgence, pourquoi celui que tu as en face de toi et qui est censé te sauver d’une menace de mort imminente, se sent obligé de poser  LA question la plus  inutile du mois, la fameuse  « T’es sûre ?  »

Tu réponds pas, toi tu hurles. Bien sûr que t’es sûre putain. Elle est tombée à tes pieds et s’est barrée sous le meuble. T’es même presque certaine qu’elle a pris le temps de se retourner vers toi pour te faire un petit doigt de fuck.

Chéri, qui venait de sortir de la douche, nu comme un ver me dit « OK je m’habille et je m’en occupe. »  D’une voix d’outre-tombe tu lui dis  » Je te laisse juste le temps de mettre un putain de caleçon et tu rappliques ton cul tout de suite pour me virer ce monstre de là où je te défonce tellement ta gueule que même ta mère pourra pas te reconnaitre. Tiens d’ailleurs en parlant de ta mère … « . Bon je m’égare … je panique en fait.

Mais pourquoi tout le monde met ta parole en doute dès que tu es hystérique aussi. Ha oui ! Peut-être justement parce que tu es hystérique.

Donc toi, tu fais le guet en attendant que ton mec daigne s’occuper de ton problème. Tu fais le guet mais de très loin … de très très très loin.

Chéri s’exécute. Donc forcément, comme elle s’est tirée en dessous d’un meuble, qui dit meuble, dit poussière que tu ne vois jamais, dit aussi plein de trucs que tu retrouves en dessous du meuble, pensant ces objets définitivement perdus. Exemple : un paquet de mégasuperjumbo couches pour vieux que chéri t’a acheté à la maternité quand tu perdais toute ton hémoglobine. T’avais juste demandé des serviettes maxiflux. Tu demandes toujours à ton mec de te ramener des trucs mais tu devrais pas si tu veux être sûre que ce soit le bon produit. Retrouvé également un bracelet que tu pensais qu’on t’avait tiré. Mémo : penser à aller retirer ta plainte pour vol au commissariat.

Là, t’es carrément en transe mais tu t’en fous. Tant que tu n’auras pas la tête de cette araignée au bout d’un pieu, tu ne seras pas apaisée et pour le bien de tous, il vaut mieux que chéri te montre le petit corps sans vie de ce truc plein de poils et de pattes. Au pire, tu prendras une chambre d’hôtel le temps que tout cela se règle.

Oui parce que le phobique est toujours dans l’excès et pense aux solutions extrêmes.

Bon, je suis arachnophobe, c’est bon, j’ai l’droit merde. Je déteste tellement leurs pattes que même sur un plateau de fruits de mer, j’ai peur des crabes. Un jour, une araignée avait décidé d’escalader le bras de moyenne mycose qui avait 1 an et demi à l’époque, tranquille en train de jouer dans son parc, détendu du body la mycose.
Panique évidemment mais surtout, ne pas transmettre tes peurs alors tu gardes ta panique pour toi. T’as le droit de faire des « hiiiiiiii » mais tu les gardes à l’intérieur de toi. Tu peux rien faire non plus contre les larmes qui coulent sur tes joues. J’ai appelé le labrador qui nous servait de chien, j’ai mis le labrador dans le parc, j’ai montré la bête de loin. Il a bouffé l’araignée. Quand on a pas de tripes, on a des idées. Même pas pensé qu’il aurait pu bouffer le bras de moyenne mycose en entier.

Et puis on oublie un peu vite qu’une seule piqure d’une de ces bestioles et tu peux te retrouver à balancer des toiles d’araignée par les poignets. Si Spiderman est tout le temps emmerdé par des tarés qui veulent dominer le monde, c’est, à l’origine, à cause d’une toute petite araignée. N’oublions jamais. J’ai pas envie d’être un héros moi.

Oh putain, elle est là et elle essaie de se barrer. Une course poursuite s’installe. Qui sera le gagnant de ce choc des titans. Bein chéri bien sûr. il a pas trop le choix sinon, c’est sa tête qui sera bientôt au bout d’un pieu.

Petite mycose a lâché son petit-déj pour venir voir la dernière animation du matin.

Voilà ! la pseudo moumoute repose maintenant en paix dans un morceau de sopalin. Énorme, même recroquevillée.

Tes esprits repris, tu sens que tu vas vomir en revoyant ta main qui a touché cette chose. Tu enlèves ce putain de chemisier. Tout le monde est d’accord pour conclure qu’il est définitivement moche. Et là, petite mycose te balance d’un air réprobateur :
« Maman, tu a tué Gipsy ! Méchante. »
Ouais, c’est vrai mais ta Gipsy là, elle a pris maman pour une gouttière !

Bon bein du coup, tu mets une veste Inès de la Fressange achetée sur la Redoute. Tu sais que pendant quelques jours tu vas vivre un enfer suite à cette agression. Tu sais que tu vas sursauter pour un rien, pour une feuille d’automne qui vole à tes pieds, pour une ombre qui bouge, pour une mouche qui se balade mains dans le dos en sifflotant parce que son ennemi numéro 1 à terminer dans un sopalin. Tu vas avoir peur de la moindre moumoute, du moindre mouvement suspect. Et puis tu oublieras.